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Chère Christophe, De quoi les Néerlandais sont-ils particulièrement fiers ? De Max Verstappen, leur champion du monde de Formule 1, certes. Mais aussi de leur grande ouverture d’esprit. Culturellement, le peuple néerlandais est très tolérant. C’est une très bonne chose : la tolérance est une valeur fondamentale qui nous permet de vivre tous ensemble en bonne intelligence et de se moquer des voisins Gaulois qui passent leur temps à se taper dessus et à manifester. Mais ce n’est pas tout ! La tolérance, c’est aussi un concept très utile derrière lequel se planquer pour ignorer toutes les agressions systémiques, et ça, c’est très pratique ! crédits Pauline Boué
Crédits illustrations : Pauline Boué

Les Néerlandais sont-ils vraiment tolérants ?

Cher Christophe,

De quoi les Néerlandais sont-ils particulièrement fiers ? De Max Verstappen, leur champion du monde de Formule 1, certes. Mais aussi de leur grande ouverture d’esprit. Culturellement, le peuple néerlandais est très tolérant. C’est une très bonne chose : la tolérance est une valeur fondamentale qui nous permet de vivre tous ensemble en bonne intelligence et de se moquer des voisins Gaulois qui passent leur temps à se taper dessus et à manifester. Mais ce n’est pas tout ! La tolérance, c’est aussi un concept très utile derrière lequel se planquer pour ignorer toutes les agressions systémiques, et ça, c’est très pratique !

Pourquoi les Néerlandais sont-ils si tolérants ?

Après 80 ans (1568-1648) de guerre sanglante entre catholiques et protestants, l’âge d’or néerlandais au 17e siècle introduit des valeurs salvatrices de tolérance. Grâce à ces valeurs, les Néerlandais pourront se livrer à des activités prolifiques comme s’ouvrir au monde et devenir les leaders du commerce mondial, plutôt que de s’entretuer et de détruire leur pays de l’intérieur.

Terre d’accueil et d’opportunité, les Pays-Bas doivent leur réputation aux nombreux immigrés et réfugiés venus trouver un abri momentané ou éternel sur leur territoire. De la cohabitation de nombreuses communautés et de leurs différents modes de vie est né le Polder Model : un système de négociation fondée  sur le consensus plutôt que la confrontation que l’on retrouve un peu partout dans la société, entre compromis, coopération et tolérance.

Un pays ouvert sur les questions sociétales

Si le monde entier sait placer les Pays-Bas sur une carte, c’est à cause des jolis moulins et des sabots, évidemment, mais c’est aussi parce que la terre batave autorise bien des choses qui ne le sont pas ailleurs. On va commencer par un petit tour dans le quartier rouge. Je sais que vous n’en avez pas envie et moi non plus, mais cette prostitution et cette vente de drogue ne sont-elles pas les plus grands symboles de la tolérance néerlandaise ?

Et pour les plus adultes d’entre vous, je peux aussi citer la PMA, le mariage et l’adoption pour les couples homosexuels, l’IVG tardif, l’euthanasie… Sujets qui déchaînent les passions partout dans le monde, mais qui sont implantés aux Pays-Bas. Il faut dire qu’ici, on prend des décisions avec son cerveau et son pragmatisme dans l’intérêt commun plutôt que de se laisser aveugler par ses émotions. Prenez-en de la graine, les autres pays !

Étude de cas :
« Zwarte Piet n’est pas raciste puisque ceux qui le défendent ne le sont pas non plus ! »

Tu fais peut-être partie de ces gens qui voient arriver la Saint-Nicolas avec plaisir, parce que c’est quand même l’aubaine de célébrer Noël deux fois. Pour moi, cette célébration marque le retour de Zwarte Piet et de la période de tension maritale associée. Notre plus gros sujet de désaccord (de loin) avec mon mari néerlandais concerne ce page maudit. Pendant toute cette période « festive », notre maison est le théâtre d’un pugilat où les unes traitent leur mari de raciste, ignorant et bas de plafond et les autres accusent leur femme d’être très hypocrite et démago. Ambiance.

 

Heureusement, le calme revient le 6 décembre au matin, mais le débat est loin d’être enterré et les discussions houleuses reprendront, comme chaque année à la fin du mois de novembre 2023. Et pour cause : je n’ai toujours pas trouvé le moyen de faire comprendre à mon Néerlandais très ouvert d’esprit et donc exempt de tout biais sociétal toxique, que rester de marbre devant un Zwarte Piet au black face tellement abusé qu’on se croirait dans Tintin au Congo, alimentait le racisme systémique.

Chère Christophe, De quoi les Néerlandais sont-ils particulièrement fiers ? De Max Verstappen, leur champion du monde de Formule 1, certes. Mais aussi de leur grande ouverture d’esprit. Culturellement, le peuple néerlandais est très tolérant. C’est une très bonne chose : la tolérance est une valeur fondamentale qui nous permet de vivre tous ensemble en bonne intelligence et de se moquer des voisins Gaulois qui passent leur temps à se taper dessus et à manifester. Mais ce n’est pas tout ! La tolérance, c’est aussi un concept très utile derrière lequel se planquer pour ignorer toutes les agressions systémiques, et ça, c’est très pratique !
La tolérance : quand les Néerlandais se planquent derrière leurs lauriers

Le racisme systé-quoi ? Mais non enfin, ce terme n’existe pas ici. T’as pas reçu le mémo à propos de la tolérance ? La société ne peut pas être raciste ! Ni sexiste d’ailleurs ! Ni homophobe ! Si des comportements xénophobes sont proférés, ils sont le fait de quelques individus marginaux. Ouin ouin, ce serait franchement injuste d’accuser tous ceux qui n’ont rien fait alors que nous, on trouve ça mal le racisme et le sexisme ! 

 

C’est aussi ça la tolérance néerlandaise : une couverture de survie sous laquelle se cacher des sujets sociétaux qui fâchent et qui impliquent chaque membre de la société, souvent malgré lui.

Ce courrier des lecteurs m’a été inspiré un article de Sarah qui sera publié à l’occasion du huit mars. Notre chère collaboratrice Work’n’Roll a écrit un texte passionnant et puissant sur les féminicides aux Pays-Bas. Un terme qui n’existe donc pas ici, puisqu’une société ouverte d’esprit ne peut encourager, même malgré-elle, aucun système d’oppression, n’est-ce pas ? Hmmmm