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Sarah Haïlé-Fida

Les questions interdites en entretien d’embauche aux Pays-Bas

discrimination à l'empbauche aux Pays-Bas - crédits @lauraine_meyer

Les entretiens d’embauche aux Pays-Bas ressemblent souvent davantage à une conversation qu’à un entretien… C’est une remarque fréquente des expatriés français. La personne qui recrute a envie d’en savoir plus sur vous : qui êtes-vous, au-delà de vos compétences. Mais entretien informel ne signifie pas que toutes les questions sont autorisées ! Loin de là. Ici aussi, il existe des critères discriminatoires qui sont couverts par la loi. Impossible par exemple de vous demander votre âge… ou si vous souhaitez avoir des enfants.

Aujourd’hui, on vous propose de faire le point et on vous donne des clefs pour gérer les situations difficiles.

Critères discriminatoires : de quoi parle-t-on ?

Il y a 25 critères discriminatoires en France et 12 aux Pays-Bas.

Les 25 critères français : 

  • sexe
  • genre
  • nom de famille
  • situation familiale
  • grossesse
  • orientation sexuelle
  • origine
  • mœurs (être fumeur, vegan, “avoir de bonnes mœurs ”…)
  • âge
  • apparence physique
  • santé
  • handicap
  • perte d’autonomie
  • religion
  • lieu de résidence
  • économie
  • domiciliation bancaire
  • langue(s)
  • exercice d’un mandat (élu.e)
  • activité syndicale
  • opinions politiques
  • ethnie
  • nation
  • race

pour ces 3 thèmes : appartenance réelle ou supposée

  • caractéristiques génétiques

Les 12 critères néerlandais : 

  • origine
  • sexe
  • orientation sexuelle
  • âge
  • handicap ou maladie chronique
  • affiliation politique
  • statut marital
  • nationalité
  • religion
  • style/philosophie de vie

     

Une fois embauché.e, vous ne pouvez pas être discriminé.e à cause : 

  • d’un travail à temps complet ou partiel
  • du type de contrat : CDI ou CDD
Quelques exemples en entretien
  • Êtes-vous enceinte ?
  • Avez-vous des enfants ?
  • Comptez-vous avoir des enfants ?
  • Êtes-vous Musulman ?
  • Quelle est votre nationalité ?
  • Quel âge avez-vous ?
  • Avez-vous un handicap ?

Toutes ces questions, quelle que soit leur formulation, sont interdites en entretien !

On ne peut pas demander à une personne, si elle a des enfants ou pense en avoir, si elle a une maladie chronique, quelle est sa religion, etc.

Mais on connaît tous des recruteurs qui vont trouver un moyen d’en savoir plus, par exemple en papotant en allant chercher la personne à l’accueil ou en la raccompagnant… Ça reste interdit ! Même si l’entretien n’a pas formellement commencé.

Il y a cependant des exceptions…

Aux Pays-Bas, la discrimination positive est autorisée (elle est interdite en France). Si une entreprise souhaite augmenter son nombre de salariées, il est possible de demander des candidates dans l’offre d’emploi.

Pour la religion, un établissement confessionnel de soins (type clinique privée, cabinet médical privé) peut demander à ce que le personnel ait la même religion.

 

Si le métier est dangereux pour une femme enceinte, on peut demander aux candidates si elles sont enceintes.

Il est interdit de demander à un candidat des informations sur son état de santé, ou la communication d’un dossier médical ou de contacter des employeurs précédents pour en savoir plus sur son absentéisme.

 

En revanche, on peut demander aux personnes en entretien si elles sont capables d’accomplir des tâches spécifiques ou de supporter certaines conditions de travail comme : lire sur un écran d’ordinateur pendant plusieurs heures, ou conduire durant plusieurs heures, etc.

On ne peut pas demander sa nationalité à une personne en entretien, mais on peut lui demander si elle a toutes les autorisations pour travailler aux Pays-Bas.

Et dans les offres d’emploi ?

Il est possible de mentionner un minimum d’années d’expérience, mais pas un maximum. Ça serait une discrimination pour les personnes expérimentées (i.e plus âgées).

 

On peut demander un niveau de langue, mais pas “de langue maternelle…”, ce qui indiquerait que l’on ne cherche que des personnes d’une nationalité spécifique.

 

On ne peut évidemment pas spécifier homme ou femme, même implicitement.

Et on ne peut pas non plus spécifier : jeune diplômé – discrimination sur l’âge.

Comment faire en cas de questions déplacées ?

La personne que vous rencontrez lors d’un entretien vous demande si vous êtes enceinte ou si vous êtes musulman.e ? Pas toujours facile de réagir.

Ça peut être une maladresse : tous les candidats ne sont pas reçus par des recruteurs de formation et certains professionnels ne sont pas formés au sujet des discriminations.

Si la personne insiste, pose plusieurs questions discriminatoires, veut avoir une réponse, ça devient plus compliqué. On vous dirait bien “fuyez à toutes jambes, ça ne présage rien de bon”, mais pouvoir refuser un emploi (même pas top) est un privilège.

Il existe quelques options, pas toujours très satisfaisantes, mais que vous pouvez tenter en entretien, qui vous permettent de poser des limites tout en continuant d’affirmer votre intérêt pour le poste : 

  • La solution Botter en touche :

Vous éludez la question avec une pirouette : vous avez l’âge parfait pour tenir le poste.

  • La solution Fixer les limites :

La question n’ayant aucun lien avec votre capacité à tenir le poste, vous le signalez à la personne.

  • La solution Rappel de la loi :

Cette question est illicite, car discriminatoire, vous n’allez donc pas y répondre.

Vous pensez que vous êtes discriminé à cause de vos réponses ou de l’absence de réponse  lors de votre entretien d’embauche ? En apporter la preuve n’est pas toujours simple, mais si vous avez toutes les compétences et l’expérience demandées dans l’offre d’emploi, c’est un bon point de départ pour demander pourquoi vous n’avez pas été retenu.e pour un poste.

Si on vous a annoncé un second entretien et puis plus rien, cela peut aussi être un indice.

Néanmoins, il sera souvent difficile de démontrer que la personne finalement recrutée était moins qualifiée que vous…

 

En France, on vous conseille de vous rapprocher du défenseur des droits ou de passer par le tribunal des Prud’hommes.

 

Aux Pays-Bas, la première démarche que l’on vous conseille est de prendre contact avec l’entreprise pour trouver une solution, qui pourra être de réévaluer votre candidature pour le poste – sans garantie néanmoins d’avoir le poste. L’idée est de contacter les RH et d’obtenir une explication plus qu’autre chose.

 

Si aucun accord n’est trouvé, vous pouvez contacter le juridisch loket proche de chez vous et/ou un antidiscriminatiebureau (organisation anti-discrimination).

 

On a probablement tous eu à un moment ou à un autre à faire à un recruteur peu scrupuleux ou tout simplement ignorant. Et souvent, dans le feu de l’action, on répond, sans y penser, à ce type de questions. Dans tous les cas : l’entreprise n’a pas le droit de vous écarter du processus de recrutement en raison de vos réponses, mais on sait qu’il sera difficile de prouver que vos réponses ont finalement fait la différence.

Comment se protéger de la discrimination en entretien ?

Avant d’en arriver là, il y a quelques actions que vous pouvez poser avant même de répondre à une offre puis au cours de l’entretien. Avant de répondre à une offre, renseignez-vous sur l’entreprise : les réseaux sociaux sont là pour ça. 

 

Consultez le site internet : est-ce que la diversité y est vraiment représentée ou les photos sont-elles issues de stock d’images ? 

 

Vous pouvez aussi faire jouer votre réseau et demander si quelqu’un connaît cette entreprise et l’ambiance qui y règne.

Pour multiplier les retours d’expérience, n’hésitez pas non plus à consulter des sites comme Glassdoor, qui proposent des témoignages de salariés et de candidats et peuvent donner un bon aperçu de l’ambiance qui règne dans l’entreprise

 

Les réseaux sociaux de l’entreprise sont également une bonne porte d’entrée : de quoi y parle-t-on ? Qui prend la parole ?

Apprenez à décrypter les offres d’emploi… on y trouve souvent des red flags !

L’offre vous informe que l’entreprise est une grande famille (aussi dysfonctionnelle que toutes les familles !) : il n’y a pas de respect des limites entre le travail et la vie privée, ou on va vous demander de vous investir au-delà de ce que stipule votre contrat de travail.

L’offre utilise uniquement le vocabulaire de la jeunesse – dynamique, rapide, on fait la fête tous les vendredis, la piscine à balles et le babyfoot sont cités comme des avantages : elle ne souhaite pas embaucher des personnes qui ont dépassé au choix, la trentaine ou la quarantaine… Et elle n’a rien prévu pour les jeunes parents.

L’offre utilise une langue inclusive : c’est déjà un bon signe (même si ça ne suffit pas).

Les questions à poser lors de l’entretien pour jauger (discrètement) son futur employeur

Vous pouvez aussi poser des questions lors de l’entretien sur les thèmes qui vous tiennent à cœur.

 

Quelle est la politique de l’entreprise en termes de diversité et d’inclusion : est-ce que le recruteur peut citer des actions concrètes ? S’il vous parle du drapeau arc-en-ciel sur le logo au moment du mois des fiertés… vous saurez à quoi vous en tenir !

 

  • Y a-t-il un congé paternité ou second parent ?

 

  • Y a-t-il une parité homme-femme au niveau du management ? Et si non, qu’est-ce qui est mis en place pour améliorer la situation ?

 

  • Y a-t-il des réunions après 16h ?

 

Ce ne sont que quelques exemples, mais il est toujours bienvenu aux Pays-Bas de poser des questions pendant les entretiens, donc autant en profiter pour poser celles dont les réponses sont importantes pour vous.

Gestion du temps, attention portée au statut, possibilité de donner son avis, autant de différences que l’on peut noter entre les entreprises néerlandaises et françaises. Ces différences ne nient pas les différences interpersonnelles : elles se mêlent les unes aux autres.